“Pourtant, pour les deux chercheurs, contrairement aux idées reçues, «il n’y a pas d’apologie de la maigreur, au contraire. Ces communautés se régulent entre elles, il y a même des controverses» , explique Antonio A. Casilli. Deuxième constat: bien souvent, les personnes souffrant de troubles alimentaires ont du mal à en parler à leur entourage, voire le cachent. «Elles trouvent dans ces plates-formes des espaces de parole, en étant comprises sans être jugées, ce qui leur procure une aide» , souligne Paola Tubaro.
Ils arrivent à la conclusion que ces communautés de malades trouvent en ligne des soutiens qu’elles n’ont pas ailleurs et recherchent plutôt un accompagnement pour la vie quotidienne. L’émergence de ces sites est, selon eux, liée au désinvestissement de l’Etat et à une mauvaise répartition des structures hospitalières sur le territoire. De fait, de nombreuses personnes ne sont pas prises en charge. Les auteurs ajoutent que ces sites sont plutôt un prisme par lequel appréhender des enjeux comme l’obsession de l’image du corps, le rapport à l’autorité médicale, etc.”
ehealth
Dernier ouvrage : “Le phénomène “pro-ana’. Troubles alimentaires et réseaux sociaux” (Oct. 2016)
Mon dernier ouvrage (co-écrit avec Paola Tubaro) est Le phénomène “pro-ana”. Troubles alimentaires et réseaux sociaux, paru aux Presses des Mines. Ce livre représente l’aboutissement de 5 ans de recherches menées avec nos collègues et amis du projet ANAMIA. Il documente aussi notre lutte pour la liberté d’expression sur Internet et pour le respect de la dignité des personnes atteintes de troubles alimentaires contre des politiques de santé publique, comment dire… malavisées.
Bref, si vous avez suivi notre travail ces dernières années, ce livre raconte notre histoire et les histoires de vie des personnes qui lisent, contribuent et participent aux communautés en ligne dites “pro-ana”…
PS. Le livre est aussi disponible en version électronique sur le portail Open Edition.
Antonio A. Casilli et Paola Tubaro
LE PHENOMENE « PRO-ANA » Postface de Cécile Méadel Paris, Presses des Mines |
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Consultés et administrés par des personnes atteintes d’anorexie ou d’autres troubles alimentaires, les sites web dits « pro-ana » sont accusés d’inspirer à la maigreur extrême. Depuis le début des années 2000, des vagues de polémiques amplifiées par les médias ont entouré ces blogs et forums, si bien que les pouvoirs publics ont essayé à maintes reprises de les réglementer.
Mais qui sont leurs auteurs, commentateurs et lecteurs ? Que recherchent-ils vraiment, avec qui communiquent-ils ? Ce livre lève le voile sur cette communauté qui a longtemps échappé au regard. Au-delà de tout propos provocateur, il interroge les usagers de ces sites internet et met au jour leurs réseaux de relations.
Et si le « pro-ana » était moins un effet indésirable de la parole libérée sur internet que le symptôme de transformations profondes de notre manière de vivre la santé ? Face au ralentissement des dépenses de santé publique en raison des coupes budgétaires de l’Etat, les patients sont aujourd’hui confrontés à l’injonction croissante d’être actifs, informés, équipés. Mais la pression sociale qui en dérive peut conduire à des comportements paradoxaux et à des prises de risque.Les résultats de cette étude défient les idées reçues et restituent une image ambivalente du web des troubles des conduites alimentaires. La valorisation de la maigreur et de l’anorexie est loin d’y faire l’unanimité. En revanche, on voit apparaître des réseaux d’entraide et d’information, dans un effort de combattre l’isolement et de pallier aux manques ressentis des services de soins.
>> Lire un extrait en pdf.
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A propos des auteurs :
Antonio A. Casilli, enseignant-chercheur à Télécom ParisTech et à l’EHESS, membre de l’Institut interdisciplinaire de l’innovation (i3 CNRS). Parmi ses ouvrages : Les liaisons numériques (Seuil 2010) et Qu’est-ce que le digital labor ? (INA 2015).Paola Tubaro, chargée de recherche au LRI, Laboratoire de Recherche Informatique du CNRS. Elle enseigne la sociologie des réseaux sociaux à l’ENS et a publié dans des revues comme Social Networks, Revue Française de Sociologie, Sociological Research Online, Sociology.
Open Cure: When Digital Humanities Meet Medical Humanities
The French translation of this essay is available on OWNI, as the first installment of my column Addicted To Bad Ideas.
While studying urban violence, I bumped into data artist and TED fellow Salvatore Iaconesi (aka xDxD.vs.xDxD), who was working on some impressive riots visualizations. A couple of weeks ago, he published a video on his website bearing quite upsetting news…
[Video: Salvatore Iaconesi – My Open Source Cure]
Despite my initial disbelief, that was not a hoax, nor a situationist artwork. Admitted to San Camillo Hospital in Rome and diagnosed with a brain cancer located in his frontal lobe, Iaconesi was facing limited therapeutic options (surgery, chemo or radiotherapy) and a poor prognosis (gliomas are almost never curable).
Determined to look for further advice, he grabbed his medical records and headed back home. Where he discovered his MRI and scans were in proprietary format… Luckily the self styled “software pirate artist” and creator of the collective Art is Open Source, had a couple of hacker tricks up his sleeve. He cracked the files, put them online, invited feedback from medical experts and laypersons. In a couple of days he started receiving everything from get well emails, to scientific literature references, to health professionals contact information, to tips for cutting-edge therapies. Of course, it was a mixed bag. So he decided to map, sort out and analyze these disparate contributions by means of a data visualization tool of his own design. The scrollwheel he now updates daily on his website is a navigable graph providing access to medical records and relevant information delivered by the online community rallied around his “open source cure”.
[Screenshot: Art Is Open Source – La Cura / The Cure]
Open cure and the Medicine 2.0 Zeigeist
The cultural significance of Iaconesi’s case is manifold. The most straightf orward way to address it would be to focus on the privacy implications of his online quest for an open cure for cancer. Is the sharing of medical records and the crowdsourcing of a treatment indicative of a shift in our relationship to the personal dimension of illness? Although the artist’s decision to “go open” about his condition is perhaps appealing for the press running the usual media circus around him, this question is far from original. Prominent cancer survivors (the likes of Jeff Jarvis or Howard Rheingold) have long argued that there’s a curative potential in Internet “publicness”. The creation of networks of people providing emotional support and sharing experiences as well as medical advice is hardly a novelty. This resonates with the experience of millions of cancer bloggers and discussion forum members, documenting their lives and daily struggles online.
Empowered patients, greedy pharmacoms and the coming 'eHealth divide'
Who wants to appropriate the so-called “eHealth revolution” and put it to commercial use? Just have a read through this scary bit of pharmacom fireside chat freshly published on The Pharmaceutical Executive Magazine website – then we’ll talk.
Thus spoke Sarah Krüg, from the Medical Education Group at Pfizer. Patients empowerment via online databases, open information sharing and web-based self-help groups represents a business opportunity for pharmacoms (but then what doesn’t?). The danger that the biomedical monopoly over health care be replaced by an even more pervasive pharmaceutical merchandising is a clear and present one.
Apomediation and Medicine 2.0 have to proceed in close association with a big dose of vigilance. Vigilance to prevent astroturfing in online communities. Vigilance to be aware of drug-pushing. Vigilance to avoid that bridging the digital divide (the age, sex and socio-economic status gap in accessing online information) doesn’t result in creating a new “eHealth divide” between those who have access to quality online information about health care – and those who are prey of Big Pharma disinformation.