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Dans Le temps du débat (France Culture, 1 mai 2020)

LE TEMPS DU DÉBAT par Emmanuel Laurentin

Bascule-t-on vers un autre monde du travail ?

Taux de chômage en forte hausse, nouvelle échelle de valeurs et d’utilité sociale, visibilisation des précaires, télétravail : la crise sanitaire a bousculé notre quotidien de travailleurs et travailleuses, jusqu’à ce 1er Mai bien empêché. 

Depuis le début du confinement, l’équipe du Temps du débat a rassemblé sur le site de France Culture, plus d’une vingtaine de textes d’écrivains, d’artistes ou d’intellectuels du monde entier qui nous ont donné leur regard sur la crise en cours. Nous `

En ce Premier mai, nous nous demandons si la crise du Covid-19 va nous faire basculer dans un autre monde du travail.

Cette semaine, nous avons en effet tous appris que le nombre de chômeurs  avait augmenté de 7,1% en mars sous le coup de la crise et de l’arrêt massif de nombreux secteurs d’activité. Parallèlement, un discours volontariste, voire optimiste, s’est développé ces dernières semaines, prônant le changement des modes de  travail à la suite de l’expérimentation forcée du télétravail pendant le confinement.

Or, celui-ci n’a touché au maximum qu’un quart des françaises et français. N’est-ce donc là qu’une projection sans fondement ? Cette crise va-t-elle donner lieu, au contraire, à des bouleversements dans le monde du travail ? Ou ne va-t-elle qu’accélérer des transformations déjà en cours ?  

[Podcast] Travail invisible, travail gratuit (France Culture, 17 janv. 2020)

Bénévolat, volontariat, digital labor: dans les associations, les entreprises ou sur nos smartphones, certaines de nos activités non rémunérées ont en commun de servir de modèles économiques à d’autres. Services publics et entreprises fonctionnent grâce à la gratuitisation de certaines activités.

Si récemment vous avez posté une photo sur Instagram, recommandé un restaurant sur TripAdvisor ou posté une critique de film sur un blog, vous n’avez pas juste partagé. Vous avez travaillé pour ces grandes plateformes. Gratuitement.  “Ces entreprises ont réussi à imposer l’idée que ces personnes qui travaillent gratuitement le font pour la communauté. Or les ressources communes qu’ils contribuent à créer (les contenus, les données…) sont captées par les plateformes et transformées en valeur monétaire à la fin”, rappelle le sociologue Antonio Casilli, spécialiste du “travail du clic” ou le digital labor 

C’est aussi au nom de valeurs — souvent l’innovation, la curiosité, l’envie de partager ou d’apprendre — que de nombreux professionnels participent à des hackathons (contraction de “hack” et de “marathon”). Durant ces événements, organisés par des entreprises privées mais aussi souvent des institutions publiques, des équipes de développeurs, entre autres, imaginent des nouveaux services ou applications. François Lacombe est ingénieur, mais aussi bénévole pour OpenStreetMap. Une association dédiée à l’ouverture à tous des données géographiques. Et c’est sur ce thème qu’il a participé des hackathons. “Cela dure 48h, souvent le week-end car c’est ouvert au grand public, et presque non-stop car il faut arriver le dimanche devant le jury avec une solution dont on sait qu’elle va fonctionner.”

[Vidéo] Invité de La Grande Table (France Culture, 26 févr. 2019)

Le 26 février 2019, j’étais l’invité de la deuxième partie de La Grande Table, le magazine culturel de France Culture.

La tâcheronnisation est-elle l’avenir du travail ?

Le Turc mécanique de Wolfgang von Kempelen (1734-1804)
Le Turc mécanique de Wolfgang von Kempelen (1734-1804) • Crédits :  Universal History Archive/UIG -Getty

Avec Antonio A.Casilli, sociologue, enseignant-chercheur à Télécom ParisTech et chercheur associé au LACI-IIAC de l’EHESS, pour “En attendant les robots. Enquête sur le travail du clic” (Seuil, janvier 2019).

D’un côté, les usagers qui laissent des traces, alimentent les réseaux de données, fournissent gratuitement du contenu. De l’autre, une armée de travailleurs mal payés et invisibles… C’est l’envers du décor que nous raconte Antonio Casilli dans « En attendant les robots : enquête sur le travail du clic » au Seuil (3 janvier 2019).

Antonio Casilli, "En attendant les robots. Enquête sur le travail du clic"
Antonio Casilli, “En attendant les robots. Enquête sur le travail du clic”

Antonio Casilli revient, entre autres, sur les malentendus qui entourent l’essor de l’intelligence artificielle, notamment sur celui qui annonce une disparition du travail peu qualifié : 

Je suis d’accord pour dire que la tâcheronnisation est en place, mais  cela concerne aussi les professions nobles.

On peut en effet constater l’existence d’un nouveau type de travail peu qualifié, nommé “travail du clic” par Antonio Casilli, qui est essentiel au développement technologique.

Le phénomène du micro-travail concerne tous les secteurs industriels aujourd’hui.

À  ÉCOUTER AUSSI

La Grande table (1ère partie)Xavier Barral, “d’un monde à l’autre”

Extraits sonores : 

  • Intervention de Yuval Noah Harari au Carnegie Council for Ethics in International Affairs, le 13 mars 2017
  • Reportage de France 24 sur une ferme à clic en Inde le 1er octobre 2013
  • Extrait du documentaire “The Cleaners” de Hans Block et Moritz Riesewieck

Un weekend “En attendant les robots” sur France Culture (5-6 janv. 2019)

A l’occasion de sa parution, France Culture a consacré trois émissions à mon ouvrage En attendant les robots – Enquête sur le travail du clic (Editions du Seuil, 2019).

Samedi 5 janv. 12h45 – La Suite dans les Idées.

Je suis en conversation avec Sylvain Bourmeau, Filipe Vilas-Boas à propos des “très artificielles intelligences artificielles”.

Derrière le mythe toujours plus médiatique de la prise du pouvoir par les machines de l’intelligence artificielle se cache la réalité de profondes transformations de l’économie et du travail. Le sociologue Antonio Casilli a mené l’enquête.

The Punishment, une œuvre de Filipe Vilas-Boas
The Punishment, une œuvre de Filipe Vilas-Boas• Crédits : Filipe Vilas-Boas

Nous en avons sans doute tous fait l’expérience. En prévision d’un séjour à l’étranger, nous avons eu recours à un site internet spécialisé pour trouver au meilleur prix une chambre d’hôtel. Et depuis, des années plus tard parfois, nous continuons de recevoir dans notre boite mail des propositions de réservation de chambre d’hôtel dans la ville où nous avions séjourné et dans laquelle nous n’avons a priori aucune espèce d’intention de retourner. De la même manière, comment ne pas être agacé par l’indigence des recommandations que nous font sans cesse d’autres plateformes web, telle Amazon qui croit que parce que nous avons consulté ceci sur ses pages nous aimerions acheter cela auprès d’elle… Ou Netflix dont l’interface s’avère d’une confondante médiocrité au regard du catalogue qu’il propose. Ces expériences quotidiennes viennent pour le moins contredire les discours de plus en plus enthousiastes qui nous vantent les progrès spectaculaires de l’intelligence artificielle. Une intelligence décidément pas très maligne. Et surtout, une intelligence bien plus artificielle encore qu’on l’imagine. Il suffit pour s’en assurer d’ouvrir quelques boîtes noires. Ce qu’a méthodiquement fait le sociologue Antonio Casilli. Mais aussi ce que fait, d’une autre façon, l’artiste Filipe Vilas-Boas, qui nous rejoindra en seconde partie.

Samedi 5 janv. 18h10 – Avis Critique.

Julie Clarini, Joseph Confavreux et Raphaël Bourgois proposent un compte rendu de mon ouvrage pour raconter “une histoire de domination”.

Je vous propose de commencer par le livre d’Antonio Casilli, En Attendant les robots : enquête sur le travail du clic publié au Seuil. L’auteur est sociologue et maître de conférences en humanités numériques à Télécom ParisTech. Ce livre est le résultat d’une longue enquête sur les transformations du travail à l’ère du capitalisme de plateforme pour reprendre le titre du livre de Nick Scnircek dont il a été question il y a quelques semaines dans cette émission. Casilli avait déjà signé en 2015 sur ce sujet, avec Dominique Cardon, Qu’est-ce que le digital labor ? chez INA Editions, et il revient avec une version francisée de la question puisqu’il parle ici du « travail du clic ».

Robot au milieu des fleurs
Robot au milieu des fleurs• Crédits : Donald Lain SmithG

Il revient donc sur ce sujet apparu dans le débat public plutôt autour des enjeux de la gratuité : l’idée selon laquelle les internautes, utilisateurs de Google ou Facebook avait accès à ces plateformes gracieusement, en échange d’un travail non rémunéré. Leurs clics, leurs données sont les matières premières qui permettent à ces sites de vivre. Mais il y a un autre aspect du digital labour, c’est de considérer les taches qui sont désormais effectuées par des robots ou des intelligences artificielles comme un grave danger pour les emplois.

Même s’il consacre un certain nombre de pages à ces évolutions, ce n’est pas ça qui intéresse fondamentalement Antonio Casilli. Il va beaucoup plus loin dans l’exploration des transformations du travail et de la valeur en menant une analyse fine de Google, Facebook mais aussi Amazon ou Uber… analyse qui montre que le vrai danger n’est pas le grand remplacement machinique, la disparition du travail, mais sa transformation profonde par l’instauration de nouveaux rapports de dépendance des travailleurs transformés en prolétaires du clic.

La première force du livre, qui est vraiment extraordinaire, c’est l’idée que les robots ne vont pas remplacer les humains. (Julie Clarini)

Il ne faut pas croire que si vous ne travaillez pas dans le digital labour, vous n’êtes pas menacé par les transformations qu’il induit. L’auteur dit bien qu’une entreprise de plus en plus numérisée fait déborder le digital labour sur le travail habituel. C’est là que l’on rejoint les thèses habituelles, de Dominique Méda notamment, selon lesquelles parcelliser, fragiliser, saccager le travail, c’est fragiliser le monde social. (Joseph Confavreux)

Dimanche 6 janv. 20h – Soft Power.

J’ai été l'”invité innovation” de Zoé Sfez et Fréderic Martel dans l’émission Soft Power.

Dans son livre “En attendant les robots”, le sociologue Antonio Casilli rend visible le travail précaire du clic derrière l’intelligence artificielle et les algorithmes et démystifie ainsi l’illusion de l’automation.

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.• Crédits : DAMIEN MEYERAFP

.@AntonioCasilli « On peut penser qu’Uber est un service classique mais le coeur du modèle d’Uber c’est la production de données » #SoftPower— Frederic Martel (@martelf) January 6, 2019

.@AntonioCasilli « Le travail ne disparaitra jamais mais l’emploi peut-être. Il faut se resyndicaliser, créer des plateformes collaboratives et penser les plateformes comme créatrice de richesses communes » #SoftPower— Frederic Martel (@martelf) January 6, 2019


[Podcast] Sur France Culture (29 janv. 2016)

Dans le Magazine de la Rédaction de France Culture du 29 janvier 2016, Nathalie Andrieux (CNNum) et moi-même étions les invités de Catherine Petillon et Tara Schlegel. Un débat serré sur les notions de travail, ubérisation, syndicalisme 2.0 et nouvelles trajectoires de l’emploi. Le tout précédé par un reportage qui s’attaque à la question ” qu’est-ce qu’aujourd’hui un collectif de travail dans le monde du travail bouleversé par le numérique ?” : nouveaux contrats, protection sociale, relations hiérarchiques…

 

» Ecouter ‘Comment travailler ensemble dans un monde numérique’ — France Culture (58 min)

 

 

[Radio] Les nouveaux ouvriers : #digitallabor à la Grande Table (France Culture, 10 nov. 2015)

J’ai eu le plaisir, pour parler de notre ouvrage sur le digital Labor et “les nouveaux ouvriers”, de retrouver Caroline Broué et l’équipe de La Grande Table, le magazine culturel de radio France Culture où j’avais été chroniqueur régulier. Avec moi, un discutant d’exception : Michel Lallement, sociologue du travail au CNAM et auteur de L’Âge du faire. Hacking, Travail, Anarchie (Seuil, 2015).

>> Ecoutez le podcast.

Le Digital Labor ou les nouveaux ouvriers

Alors que Manuel Valls lance un chantier de réécriture du Code du Travail, qu’Emmanuel Macron présente les grandes lignes du projet Noé, sur les nouvelles opportunités économiques ouvertes par le numérique, on pourrait penser que le Digital Labor est un concept tendant à montrer qu’internet a changé notre façon de travailler. En fait, il en va tout autrement sous la plume d’Antonio Casilli qui décrit l’émergence de nouvelles formes “implicites” de travail : comment le travail s ‘est-il “glissé dans tous les interstices de notre activité”?

 

Tripadvisor, Uber, Facebook, Amazon… : il semble que toutes ces plateformes “participatives” brouillent les frontières entre le travail et les activités personnelles. Comment, dans ce contexte d’essor du numérique, définir ce qui est de l’ordre du travail? Il semble que le fait de produire de la valeur ne suffise plus, mais comment alors éviter une forme d’aliénation par l’assimilation du temps de travail et du temps de vie? Internet ne serait-il plus un outil d’émancipation? Quelle luttes sociales peut-on mener autour du numérique? Y a-t-il une classe de “prolétaires du clic”?

 

Antonio Casilli : “On voit émerger un travail qui ne dit pas son nom, qui n’est pas reconnu comme un travail.”

“Il y a une superposition entre le rôle de consommateur et le rôle de producteur.

Michel Lallement : “Ce qui est travail c’est ce qui contribue à produire de la valeur. Comment comprendre le chainage entre le fait de cliquer sur facebook, et l’énorme production de valeur qui en découle?”

 

[Podcast] Antonio Casilli sur France Culture : Profil public / Profil privé (27 nov. 2013)

Le sociologue Antonio Casilli était l’invité de Marie Richeux pour l’émission Pas la peine de crier (France Culture).

“Public” (3/5): Profil public / Profil privé

Troisième moment de cette semaine entièrement consacrée à lidée de “public” sous toutes ses formes. Avec Antonio Casilli, nous réfléchissons aujourd’hui à la publicité du privé, et à l’usage qui en est fait sur quelques réseaux sociaux. 

 

Antonio Casilli © rf

Aujourd’hui, appliquons-nous à marcher sur la frontière public/privé dont les enjeux se modifient, se déplacent et se redistribuent à l’intérieur des réseaux sociaux numériques, ou par l’usage de plus en plus répandu de ceux-ci. Si l’on considère que les relations numériques ne remplacent pas les autres relations, qu’elles s’ajoutent à elles pour constituer le réel, on peut cependant les analyser en cherchant à comprendre leur spécificité. L’apparition d’ordinateurs personnels, de petite taille, fait entrer la technologie dans l’espace privé du logement, de la chambre. Qu’injectons-nous dans l’ordinateur et dans ses dérivés de ce que nous pouvons appeler « vie privée », terme qui est évidemment à discuter… Dans la mesure où une information échangée sur le web peut avoir une valeur tour à tour confidentielle et collective, et que cette qualification est un curseur que l’utilisateur ne maîtrise pas toujours, qu’est-ce qui se joue exactement pour les individus et les communautés qu’ils composent ?
Antonio A. Casilli est maître de conférences en Digital Humanities à Telecom ParisTech et chercheur en sociologie au Centre Edgar-Morin (EHESS, Paris). Il est l’auteur notamment de Les liaisons numériques (Ed. du Seuil, 2010).

 

Bye bye, La Grande Table

Le vendredi 19 juillet 2013, Caroline Broué a accueilli une délégation des chroniqueurs de La Grande Table pour un dernier épisode avant la fin de la saison – et avant de démobiliser « la brigade ». Par ce terme on a désigné, dans le jargon propre à l’émission, le groupe d’une cinquantaine d’écrivains, artistes, chercheurs et intellectuels assortis qui a animé la première partie du magazine culturel du midi sur France Culture. Je l’avais intégré en 2011, sur invitation de Caroline même, et de Raphaël Bourgois, producteur de l’émission. Une expérience enrichissante, qui m’a permis de rentrer dans l’actualité des débats intellectuels français et internationaux, de sortir quelque peu de mon rôle de “docteur ès geekeries”, de côtoyer des personnes que j’admire, et – parfois – de me disputer avec eux à l’antenne 😉

La Brigade de la Grande Table dans les locaux de France Culture. De gauche à droite : (debout) Tobie Nathan, Pascal Ory, Gérard Mordillat, Mathieu Potte-Bonneville, Fabienne Servan-Schreiber, Antonio A. Casilli, Caroline Broué, Dominique Cardon, (assis) Christophe Prochasson, André Gunthert, Raphaël Bourgois.

 

C’est le moment donc de remercier tou(te)s : les autres brigadistes/brigadiers, les journalistes, les producteurs, les stagiaires et les techniciens (la quantité de gens nécessaire pour faire marcher une émission…). Et je vous laisse avec une petite sélection de podcasts d’épisodes de La Grande Table auxquels j’ai eu le plaisir de participer :

L’accès ouvert aux revues en sciences humaines et sociales – 15.04.2013

Beppe Grillo et le populisme 2.0 en Italie – 28.03.2013

Guy Debord à la BNF – 22.03.2013

A propos du rapport de l’Académie des Sciences L’enfant et les écrans – 08.02.2013

Pour les 30 ans du protocôle TCP/IP – 29.01.2013

– A l’occasion de la parution de Karaoke Culture de Dubravka Ugresic – 31.12.2012

A l’occasion du colloque BNF Comprendre le phénomène pro-ana – 29.11.2012

Nouvelles mythologies : de la voiture au smartphone – 04.10.2012

La NSA et le loi LOPPSI : extension du domaine de la surveillance sur Internet – 23.05.2012

Pour le centenaire d’Alan Turing – 25.04.2012

L’affaire Megaupload : le début de « l’Internet de plomb » ? – 08.02.2012

L’intimité à l’épreuve des réseaux sociaux numériques – 05.01.2012