antonio casilli

Troubles alimentaires et réseaux sociaux: entretien (Radio Télévision Suisse, La 1ère, 5 nov. 2016)

TROUBLES ALIMENTAIRES ET RÉSEAUX SOCIAUX : dérive ou entraide Les défis genre  » bikini bridge  » ou  » A4 waist challenge  » fleurissent toujours sur Internet et sur les réseaux sociaux. Il sʹagit par exemple dʹêtre suffisamment maigre pour cacher sa taille derrière une feuille A4 tenue verticalement. De là à penser que la jungle numérique encourage les troubles alimentaires, il nʹy a quʹun pas. Mais ce nʹest pas si simple. Une vaste étude montre que derrière ces conversations digitales se cachent des communautés qui sʹentraident, qui se soutiennent, loin de lʹapologie de lʹanorexie souvent décriée. Voyage entre idées reçues à la peau dure et étude sociologique, avec nos chroniqueurs Anne Flament et Didier Bonvin. Invité : Antonio Casilli, professeur à ParisTech et chercheur associé à l’EHESS et co-auteur de “Le phénomène pro ana. Troubles alimentaires et réseaux sociaux” paru aux Presses des Mines

Source : Troubles alimentaires et réseaux sociaux: dérive ou entraide

Compte rendu de “Le Phénomène ‘pro-ana'” dans Le Monde (24 oct. 2016)

“Pourtant, pour les deux chercheurs, contrairement aux idées reçues, «il n’y a pas d’apologie de la maigreur, au contraire. Ces communautés se régulent entre elles, il y a même des controverses» , explique Antonio A. Casilli. Deuxième constat: bien souvent, les personnes souffrant de troubles alimentaires ont du mal à en parler à leur entourage, voire le cachent. «Elles trouvent dans ces plates-formes des espaces de parole, en étant comprises sans être jugées, ce qui leur procure une aide» , souligne Paola Tubaro.

Ils arrivent à la conclusion que ces communautés de malades trouvent en ligne des soutiens qu’elles n’ont pas ailleurs et recherchent plutôt un accompagnement pour la vie quotidienne. L’émergence de ces sites est, selon eux, liée au désinvestissement de l’Etat et à une mauvaise répartition des structures hospitalières sur le territoire. De fait, de nombreuses personnes ne sont pas prises en charge. Les auteurs ajoutent que ces sites sont plutôt un prisme par lequel appréhender des enjeux comme l’obsession de l’image du corps, le rapport à l’autorité médicale, etc.”

Source: Les sites « pro-ana » passés au crible

Dans Télérama (14 juin 2016)

Microsoft rachète LinkedIn pour 26 milliards de dollars : une certaine vision du travail

En rachetant le réseau social professionnel pour une somme astronomique, Microsoft s’offre surtout plus de 400 millions de CV. De quoi accentuer son contrôle sur nos vies…

Vous rouliez des yeux quand Facebook a racheté WhatsApp pour 19 milliards de dollars en février 2014 ? Rajustez vos orbites : lundi 13 juin, Microsoft a annoncé l’acquisition de LinkedIn pour 26,2 milliards de dollars. Fort d’une communauté de 433 millions d’utilisateurs (dont 128 aux Etats-Unis, et 11 en France), le réseau social professionnel aux profils impeccablement repassés a connu une croissance endémique depuis sa création en 2002, multipliant par près de 100 000 le nombre de ses inscrits. Même s’il est encore loin d’un Facebook et de son milliard et demi d’utilisateurs, il tient ainsi la dragée haute à Twitter (310 millions).

Dans un communiqué, Jeff Weiner, le patron de LinkedIn, s’est (évidemment) réjoui de ce deal stratosphérique : « Comme nous avons changé la façon dont le monde se connecte aux opportunités, ce partenariat avec Microsoft – et la combinaison de leur cloud avec [notre] réseau – nous offre la possibilité de changer la façon dont le monde travaille. Depuis treize ans, nous jouissons d’une position unique pour mettre en contact des professionnels, les rendre plus productifs et performants, et je me réjouis de mener notre équipe à travers ce nouveau chapitre de notre histoire ». Même son de cloche du côté de Satya Nadella, le boss de Microsoft, dont le champ lexical diffère peu de celui de son homologue. « Nous poursuivons le même objectif : donner du pouvoir aux gens et aux organisations », écrit-il dans une note interne publiée par The Verge. « Avec notre croissance autour d’Office 365 et de Dynamics (un logiciel de gestion à destination des entreprises, NDLR), ce rachat est fondamental si nous avons l’ambition de réinventer la productivité et le travail ».

Digital labor

Productivité, performance, travail, trois mots qui pourraient éclairer ce rachat. Qu’on résumera ainsi : en acquérant LinkedIn, Microsoft fait d’abord main basse sur nos vies professionnelles. Une base de données qui permettra au géant américain de fusionner des « graphes sociaux » (la cartographie des connexions entre les utilisateurs), mais aussi d’accroître ses profits grâce aux internautes ? « Ce n’est pas un hasard si les patrons de LinkedIn et Microsoft insistent sur une sémantique liée au travail, estime Antonio Casilli, chercheur à Télécom ParisTech. C’est un vocabulaire cohérent avec l’extraction de données des utilisateurs qui valorisent les grandes plateformes ».

C’est le principe du digital labor : qu’il s’agisse de l’ami que vous ajoutez sur Facebook, du tweet que vous postez, ou de n’importe quel champ que vous renseignez sur un site ou un réseau social, chaque clic produit de la valeur. Soit la version théorisée de cette antienne numérique : « Si c’est gratuit, c’est toi le produit ». Pour Antonio Casilli, « il existe une richesse énorme liée à l’incitation, voire l’injonction – par le jeu des mails et des notifications – à réaliser du travail gratuit pour ces plateformes. En achetant WhatsApp, Facebook a obtenu des centaines de millions de numéros de téléphone ; en faisant l’acquisition de LinkedIn, Microsoft obtient plus de 400 millions de CV, et autant d’annuaires professionnels ».

Emprise quasi-totalitaire ?

Mais pour quoi faire ? Le rachat de LinkedIn dit-il quelque chose de Microsoft et de sa vision du travail ? Selon Antonio Casilli, le danger d’une subordination technique des travailleurs guette, tapi derrière la machine à café : « Microsoft assume sa volonté de prendre en charge toute la vie d’une entreprise, de son univers bureautique, bureaucratique même, en passant par ses outils de formation ou son système d’exploitation. Qui revêt ici un sens très littéral, puisque le système remplace le supérieur hiérarchique dans le rôle du donneur d’ordres. La vision du travail selon Microsoft, c’est celle d’un hypertravail qui peut pénétrer tous les moments de notre vie ».

Dès lors, faudrait-il analyser les prises de guerre du web – WhatsApp et Instagram par Facebook ou Skype par Microsoft – à travers le prisme d’une emprise quasi-totalitaire et très féodale sur nos existences ? « Les géants d’internet sont moins intéressés par une oligarchie à quatre ou cinq que par un contrôle hégémonique sur tous nos usages », tranche Antonio Casilli. Et dans une approche transactionnelle de la vie privée (selon laquelle notre compte LinkedIn, fruit d’une division équitable, vaudrait 53 euros), 26 milliards de dollars, c’est finalement pas cher payé.

Source: Microsoft rachète LinkedIn pour 26 milliards de dollars : une certaine vision du travail – L’actu Médias / Net – Télérama.fr

Capitalisme des plateformes : interview dans L’Humanité (26 mai, 2016)

Ces gens-là ne licencient pas, ils « désactivent » !

Entretien réalisé par Pia de QuatreBarbes
Jeudi, 26 Mai, 2016
Humanité Dimanche

Photo : AFP

Pour Antonio A. Casilli, professeur à Télécom ParisTech et chercheur associé à l’EHESS, le capitalisme de plateforme pousse le travail en dehors de l’entreprise. Et surtout, il reporte tous les risques sur le seul travailleur. Entretien.

HD. Pourquoi refusez-vous ce terme d’ubérisation ?

Antonio Casilli. Avant tout parce que c’est un terme de communicants du CAC 40. Il faudrait plutôt mobiliser le concept de « plateformisation ». La plateforme réalise un appareillement algorithmique entre différents groupes humains. Elle met en communication consommateurs et producteurs, travailleurs et recruteurs… C’est un changement de paradigme qui s’étend à toutes les réalités productives. Même les grandes entreprises para-étatiques sont poussées à l’adopter, à travers les initiatives de numérisation, comme celle d’EDF (par exemple le compteur Linky) ou de La Poste. Elles cherchent à se transformer en gestionnaires de flux de données et opérateurs de cette mise en relation de différents groupes humains.

HD. Quelles sont les conséquences sur le travail ?

A. C. On assiste à un phénomène d’éviction des forces productives. Les plateformes poussent l’activité travaillée en dehors de l’entreprise. Elle est effectuée au sein d’un écosystème dans lequel tout le monde est mis sous le régime du travail : les sous-traitants, mais aussi les consommateurs. C’est un travail qui peine à se faire reconnaître, déguisé sous les appellations « socialisation », « partage », « collaboration ». Le travailleur, lui, doit apporter ses moyens de production : son véhicule, son logement, son vélo… Cette responsabilité de se doter de ressources matérielles lui revient. C’est un nouveau travail à la pièce, régi par les plateformes. Nous assistons à une véritable « tâcheronisation numérique ».

Le capitalisme de plateforme reporte sur le travailleur le risque de fluctuation du marché. Si l’activité est interrompue à cause d’une baisse des commandes, l’entreprise ne fait finalement qu’arrêter de donner du travail. Ce risque du marché était la responsabilité historique de l’entrepreneur. Or les plateformes ne le prennent plus, elles s’affichent comme de simples intermédiaires.

La sociologue américaine Gina Neff l’appelle le « venture labour », le « travail risque », constamment soumis au péril de ne pas pouvoir approcher la rémunération promise. C’est le cas des plateformes de microtravail comme Amazon Mechanical Turk (une traduction ou une identification de photos, payées enmoyenne 1,7 euro l’heure – NDLR).

HD. C’est un retour au XIXe siècle sous les airs de la modernité…

A. C. Oui, on est en train de répéter une histoire qui consiste à réaffirmer les droits fondamentaux pour des personnes, non reconnues comme travailleurs. Une plateforme comme Uber ne licencie plus ses travailleurs, elle les « désactive ». Car, pour Uber, il ne s’agit plus d’un salarié, mais d’une figure professionnelle beaucoup plus ambiguë. Nous ne sommes plus dans des situations d’emploi formel, mais de travail implicite.

HD. Comment reconnaître ce travail implicite ?

A. C. Les plateformes présentent souvent l’activité comme ludique, mais il y a toujours quatre éléments qui relèvent de l’activité travaillée classique. D’abord, elle produit de la valeur. Deuxième critère, il y a un encadrement contractuel, notamment sous la forme des conditions générales d’usage. Elles établissent qui fait quoi pour qui et qui profite des activités sur la plateforme. Autre élément : le traçage. Nous sommes soumis à des métriques de performance comme le temps de connexion, le nombre de contacts, la réputation.

Le dernier aspect, de plus en plus visible, est la dimension de subordination. Le système légal français ne reconnaît que la subordination juridique. Mais, dans d’autres pays, la loi a introduit la notion de la parasubordination : la dépendance économique, les sujétions particulières… En France, on ne voit pas qu’une subordination aujourd’hui s’installe à travers l’utilisation du système technique même. Le chef donneur d’ordres a été remplacé par l’algorithme envoyeur de notifications. C’est lui qui dit au chauffeur Uber où aller, au coursier Deliveroo où livrer.

« Qu’est-ce que le digital labor ? » d’Antonio A. Casilli et Dominique Cardon, éditions INA, 2015.

Source: Ces gens-là ne licencient pas, ils « désactivent » ! | L’Humanité

[Slides séminaire #ecnEHESS] Les univers de travail dans les jeux vidéo (B. Vétel & M. Cocq, 6 juin 2016)

Pour la dernière séance de l’année 2015/16 de mon séminaire EHESS Etudier le cultures du numérique, j’ai eu le plaisir d’accueillir Mathieu Cocq (ENS Cachan) et Bruno Vétel (Télécom ParisTech) pour un débat autour du travail des gamers dans l’industrie des jeux vidéo.

Le séminaire reprendra l’année prochaine, plus grand et plus fort que jamais.

Mathieu Cocq (ENS Cachan)
Le travail des joueurs dans l’industrie du jeu vidéo

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Cette intervention porte sur la participation des joueurs à la création de valeur dans l’industrie du jeu vidéo. Les évolutions récentes des modèles de revenu (monétisation, vente de contenu additionnels, micro-transactions), de production (implication marquée de joueurs à toutes les étapes du développement, sous forme de versions alpha, beta, early-access), et de diffusion (massification du streaming sur des plateformes comme Youtube ou Twitch) nous amènent à penser l’activité des joueurs comme un véritable facteur de production dans l’industrie du jeu vidéo. A travers l’examen d’un matériau qualitatif varié (études de cas, entretiens semi-directifs, observation de plusieurs mois, archives de forums), nous chercherons à donner des éléments d’analyse de ce travail, de la manière dont il est activé et invisibilisé par les entreprises du secteur, de sa rémunération et des conflictualités auxquelles il donne lieu.

Bruno Vétel (Télécom ParisTech)
À quoi jouent les « farmers » ? La construction sociotechnique des activités répétitives des joueurs en ligne. 

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Les jeux en ligne sont caractérisés par la cohabitation de joueurs, qui réalisent des activités plus ou moins monotones. Les plus simples sont exercées par des participants souvent désignés comme des « farmers ». Cette communication s’appuie sur une quarantaine d’entretiens réalisés avec des concepteurs et des joueurs en ligne dans le cadre d’une thèse qui porte sur le jeu en ligne Dofus. Nous décrivons comment les joueurs de Dofus sont encouragés à l’exercice du « farm » par des éléments de design relativement simples qui sont de deux types. Les premiers sont inspirés d’un imaginaire du travail productif, les seconds assurent les circulations des objets du jeu suivant des principes économiques très classiques. Nous montrons que cette construction sociotechnique rend compte d’une séparation des activités de « farm » en fonction du budget que les joueurs peuvent dépenser pour jouer. Un budget qui s’avère souvent lié à leur classe sociale d’origine.

Photo credit: Tereza Ruller @ The Royal Academy of Arts, The Hague. All rights reserved (c) 2015

Recension de “Qu’est-ce que le Digital labor” dans La nouvelle revue du travail (mai 2016)

Recensions et notes de lecture

Dominique Cardon et Antonio A. Casilli, Qu’est-ce que le Digital labor ?, Paris, Ina Éditions.

Jean-Pierre Durand
Cardon et Caselli – Qu'est-ce que le Digital Labor ?

1Ce petit ouvrage a au moins deux vertus : nous aider à définir le digital labor et faire dialoguer deux auteurs en désaccord profond sur la portée ou sur les significations de l’émergence de cette nouvelle pratique et de ses analyses scientifique outre-Atlantique (Digital Labor Studies) depuis 2009.

2Antonio Casilli, enseignant à Télécom Paris-Tech et chercheur à l’Institut interdisciplinaire de l’innovation (i3), signe la première partie en s’intéressant aux critiques des usages de l’Internet et des réseaux dits sociaux. Dans l’impossibilité d’une traduction en français du concept, Casilli voit dans ces pratiques technologisées « des formes d’activités assimilables au travail, parce que productrices de valeur, faisant l’objet d’un quelconque encadrement contractuel et soumises à des métriques de performance. Nous appelons digital labor la réduction de nos liaisons numériques” à un moment du rapport de production, la subsomption du social sous le marchand dans le contexte de nos usages technologiques. » (p. 12-13) Ce qui fait que le digital labor est une activité et/ou un travail (soit aussi un objet de recherche que l’on peut tenter de circonscrire), nourrissant un courant théorique (pluraliste) analysant ces pratiques comme productrices de valeur, à l’encontre des opposants à une telle interprétation (voir ci-dessous les contre-analyses de Dominique Cardon). Ce qui est certain est que le digital labor conteste les visions quelque peu naïves qui prévalaient dans la décennie précédente quant à la gratuité ou à la nature des activités collaboratives sur ou par Internet, voire à la création d’un Common que serait Google ou tout distributeur d’images gratuites sur le net.

3La question qui traverse cette analyse porte sur la nature et les principes de la création de valeur par les internautes, le digital labor se présentant comme « une contribution à faible intensité et à faible expertise mise à profit via des algorithmes et des fouilles de données — data mining » par des plateformes numériques. Ainsi, les utilisateurs, en tant que producteurs de données (vendues aux annonceurs) sont à la fois des marchandises et des travailleurs : « Les publics numériques sont des audiences hybrides qui ne peuvent jamais être réduites à la condition de simples spectateurs. Finalement, pour eux, une conscience exacte du moment où le dispositif numérique est en train de commander leur travail, ou de leur accorder un moment d’oisiveté est impossible à entretenir. » (p. 27) Le lecteur voit poindre ici la thèse de la création d’un surplus de travail non rémunéré au bénéfice des plateformes.

4L’intérêt d’un tel point de vue est de montrer comment producteur et consommateur se rejoignent ou se confondent dans une activité unique, certainement au bénéfice des propriétaires de la plateforme, mais aussi du prosumer, ce producteur-consommateur qui « travaille » d’abord pour lui-même et/ou qui prend plaisir à son activité, y compris à travers une démarche collective qui fait sens et qui pousse toujours plus loin son travail. Or, c’est justement à partir de ce travail personnel et de toutes les données qu’il produit que ces plateformes vont disposer d’informations personnelles qu’elles vont valoriser. D’où la revendication d’une rémunération de ce travail selon des voies à définir et que présente A. Casilli, que ce soit sous forme de salaire ou à partir d’une révision du droit commercial ou toute autre voie, y compris celle d’un « revenu de base comme levier d’émancipation et de mesure de compensation pour le digital labor » (p. 39). Pour commencer, on pourrait souhaiter une réforme du droit fiscal afin que ces plateformes commencent à payer les taxes là où elles opèrent, c’est-à-dire là où se situent les millions d’usagers qui réalisent un « travail invisible »

Lire la suite sur le site web de la Nouvelle Revue du Travail.

Digital labor – recension dans la Revue Européenne des Médias et du numérique (n°. 37, 2016)

Digital labor

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Ce terme, qui n’a pas encore d’équivalent en français, désigne une forme nouvelle de travail, née de l’économie numérique, que constituent tous les modes de participation des internautes – blog, post, commentaire, vidéo, photo, « like », inscription ou recherche en ligne, etc. – sur les plates-formes numériques (…). Pour les théoriciens du digital labor, ces pratiques qui, de diverses manières, entretiennent le fonctionnement des réseaux sociaux et autres services internet sont assimilables à un travail et elles pourraient être valorisées comme tel. Cependant la thèse du digital labor ne fait pas consensus. Cette notion reste un domaine de recherche universitaire, ouvert par les travaux de Trebor Scholtz, (Digital Labor : The Internet as Playground and Factory, 2012) et Christian Fuchs (Digital Labour and Karl Marx, 2014).

En France, deux publications récentes reflètent l’attention portée à cette désignation des activités des internautes comme un travail inhérent au modèle économique des géants de l’internet : Qu’est-ce que le Digital Labor, édité par l’INA en juin 2015, compte rendu d’un débat organisé autour d’Antonio Casilli, maître de conférences à Télécom ParisTech, et de Dominique Cardon, sociologue à l’Orange Labs, ainsi que le rapport du Conseil national du numérique (CNNum), « Travail, Emploi, Numérique, les nouvelles trajectoires », remis en janvier 2016 à Myriam El Khomri, ministre du travail.

Fondée sur la collaboration, l’échange des connaissances et le bénévolat, la philosophie originelle de l’internet, promue par la communauté du logiciel libre ou celle des wikipédiens, s’éloigne tandis que se développe la marchandisation des usages numériques. Indéniable, ce phénomène se renforce à mesure que les appareils et les objets connectés se propagent. A l’approche économique du digital labor, théorique et subversive, s’oppose une vision sociologique, empirique et humaniste, de la contribution effective des internautes aux plates-formes internet.

Selon Antonio Casilli, le digital labor se définit par « la mise au travail de nos “liaisons numériques” ». A l’encontre des recherches consacrées aux usages « positifs » sur le web – la participation, le partage, le don –, au début des années 2010, les théoriciens du digital labor ont orienté leurs travaux, « sur les phénomènes de captation de la valeur par le capitalisme des plates-formes numériques, sur les dynamiques de récupération marchande des flux de générosité par les entreprises du web, qui ont prospéré durant ces dernières années en comptant sur la libéralité des utilisateurs et sur leur envie de participation ». A l’envie et au désir de contribution que pourraient manifester les internautes, ils opposent « une relation de travail non rémunérée ». Le digital labor est à la fois un travail « invisible » et « immatériel », un travail « des publics » et « des consommateurs ». Sa principale caractéristique est d’être « implicite », qu’il s’agisse des contenus générés par les internautes ou des données fournies par leurs diverses activités en ligne.

Du simple « clic » sur un lien d’un « j’aime », d’une requête dans un moteur de recherche aux collaborations plus actives telles qu’un post, une recommandation, un commentaire ou le partage d’une vidéo, jusqu’au système des reCAPTCHAs mis en place pour Google Books afin de pallier les défaillances de la reconnaissance automatique de caractères pour numériser des livres (les tests CAPTCHA servent à distinguer un utilisateur humain d’un robot en lui demandant de déchiffrer des mots déformés), il s’agit là de reconnaître la mutation des activités des internautes et des consommateurs en un travail « qui aide les machines », réalisé au profit des plates-formes numériques. Ainsi les tenants du digital labor invitent-ils « à ne plus considérer la production de valeur comme un acte volontaire et spécialisé ».

De récentes polémiques illustrent le problème posé par « la monétisation des contenus générés par les internautes », comme le rappelle Antonio Casilli en évoquant la question de la rémunération des blogueurs sur un site de presse ou encore la revente, par une plate-forme de partage, de photos mises en ligne sous licence Creative par des photographes amateurs. Et il ajoute : « Quel type de pression salariale s’exerce dans les secteurs les plus divers (journalisme, industries culturelles, transports, etc.) par la création d’une armée de réserve de “travailleurs qui s’ignorent”, convaincus d’être plutôt des consommateurs, voire des bénéficiaires de services gratuits en ligne ? » Les utilisateurs ont en général peu conscience de la somme d’informations qu’ils fournissent aux plates-formes et ignorent même qu’ils le font dans le cadre d’un véritable contrat en acceptant, bien souvent sans les lire, les conditions générales d’utilisation des services.

Pour les théoriciens du digital labor, la massification des usages numériques se traduit par l’émergence d’un travail « gratuit » qui correspondrait à une forme nouvelle d’aliénation. « D’un faible niveau d’implication » mais « omniprésent », ce travail des utilisateurs et des consommateurs, dont la qualification resterait à préciser, est incontestablement créateur de valeur. Le rapport du CNNum précise : « Cette valeur est captée et reconnue par les entreprises, qui l’intègrent dans leur modèle d’affaires : la collecte de données des utilisateurs à des fins de marketing, de publicité ou de revente, la recherche des effets de réseaux ou encore la valorisation des contenus produits par les utilisateurs en sont autant d’exemples. C’est donc cette nouvelle forme de création de valeur, qui ne donne pas lieu à rémunération, qui semble nécessiter une réflexion sur la conjonction entre rémunération et travail tel qu’il est aujourd’hui reconnu. »

Critique au regard de la notion d’aliénation, Dominique Cardon, quant à lui, adopte une autre démarche, se plaçant du côté des citoyens internautes. Selon le sociologue, l’approche économique qui aboutit au concept de digital labor correspond à une interprétation « extérieure » aux pratiques numériques – une analyse du web « comme un système » –, à partir de laquelle « il est assez facile de constater que les internautes, à travers leurs échanges et leurs contributions, produisent gratuitement une valeur que monétisent les plates-formes ». Mais ce postulat passe sous silence un élément essentiel à la compréhension des pratiques numériques, celui de la massification de l’internet qui est « une véritable démocratisation culturelle et une ouverture vers l’expression en ligne des publics populaires », grâce à la vidéo, la photographie, les mèmes et autres « lolcats ».

Contrairement aux médias traditionnels qui établissent une stricte distinction entre ceux qui émettent et ceux qui reçoivent, l’internet a permis une « démocratisation démographique » des échanges, pour reprendre l’expression de Dominique Cardon, minorée ou déplorée par certains observateurs « au prétexte qu’ils ne sont pas dotés des qualités attendues d’une coopération entre personnes compétentes et diplômées ». Les nouvelles pratiques numériques redistribuent les rôles, superposent espace privé et espace public, brassent contenus commerciaux et informations d’intérêt général. Elles abattent toute forme traditionnelle de repères. « Libéré du carcan des gatekeepers, l’espace public numérique défait les catégories traditionnelles et mélange indifféremment technique, consommation, expression, trivialité et dérision », explique le sociologue. Aux défenseurs de l’esprit pionnier de l’internet qui voient le web dénaturé, devenu un lieu de satisfactions individualistes et mercantiles plutôt que le tremplin pour une émancipation sociale et collective, Dominique Cardon répond par cette provocation : « Les marchands de l’internet ont sans doute plus fait pour la démocratisation démographique des usages que les communautés historiques. »

Intermédiaire technique entre l’offre et la demande, l’activité économique des plates-formes consiste à agréger des contenus ou des données et à les mettre à disposition. Si les internautes produisent effectivement ces « biens », chacune de ces productions resterait « sans valeur aucune » si elles n’étaient pas transformées dans leur ensemble « par un mécanisme d’agrégation, de calcul, de comparaison, de filtre, de classement ou de recommandation qui leur confère un sens (pour les internautes) et une valeur (pour les plates-formes), répond Dominique Cardon aux adeptes de la thèse du digital labor. Le service rendu par la plate-forme, qui consiste à agréger les interactions et à automatiser la révélation d’une “intelligence collective” des productions unitaires grâce aux algorithmes, est négligé ou minoré dans ces travaux, alors que c’est lui qui rend valorisable le travail gratuit des internautes ».

Transformer des pratiques sociales en pratiques économiques – « économisation » – en considérant que les internautes qui s’expriment en ligne se retrouveraient de facto pris dans un système marchand qui les rendrait « calculateurs », et donc conscients de la valeur d’échange de leur contribution, revient selon Dominique Cardon à faire abstraction des « motivations intrinsèques » des internautes telles que les définissent les économistes. Ainsi les pratiques des internautes sont-elles consubstantielles à leurs motifs d’agir. « Ils trouvent en eux-mêmes la valeur qui les motive : le plaisir, l’excitation, le don, la passion, le souci du partage, le goût de l’échange, le sentiment de dette et de responsabilité qui naît d’un faire en commun… » Ces pratiques leur apportent en retour reconnaissance, estime et réputation. « La construction de systèmes de reconnaissance méritocratique des accomplissements des internautes aura sans doute constitué l’œuvre la plus subtile et la plus originale des pionniers. »

Sur l’internet comme sur les médias traditionnels, la gratuité des services a un prix, calculé en termes d’audience – la durée, le nombre d’individus, leur CSP – revendue aux annonceurs. Renforcée et encouragée par la popularité des outils numériques, la participation des internautes, implicite ou explicite, involontaire ou volontaire, est à la base de l’économie des plates-formes du web. Relève-t-elle pour autant de « l’exploitation » des consommateurs-travailleurs, tels que les définit la sociologue Marie-Anne Dujarier (Le travail du consommateur, 2008) au profit des détenteurs des plates-formes numériques qui en tireraient seuls la richesse ? C’est la question posée par le débat ouvert autour du digital labor. « Si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit » devrait plutôt se dire « Si c’est gratuit, c’est que vous y travaillez » écrit Antonio Casilli. En outre, explique-t-il, la réflexion pourrait être étendue aux plates-formes qui ont recours à des humains pour effectuer un micro-travail à la tâche (Hits pour Human intelligence tasks) peu qualifié, destiné à aider les machines à apprendre, comme Amazon Mechanical Turk (voir La REM n°34-35, p.84) – « centre d’élevage pour algorithmes » –, en passant par les entreprises d’économie collaborative telles qu’Uber et Airbnb, dont « le cœur de métier est l’exploitation algorithmique des données de mobilité et de consommation de leurs utilisateurs ».

Afin de mieux comprendre ce qui se joue dans le débat sur le digital labor, où sont mêlées des réalités aussi différentes que les nouvelles usines « à clics » ou l’offre de services en ligne qui, en contrepartie des « traces » laissées à disposition, permettent aux internautes d’échanger des photos entre amis, de rechercher ou de publier en ligne, il faut sans doute opter pour une vision plus large de la nouvelle économie numérique, qui s’appuie sur l’émergence d’un « capitalisme cognitif ». Antérieure à la théorie du digital labor, cette conception de la transformation du capitalisme est résumée dans le rapport du CNNum comme « un système d’accumulation dans lequel la valeur productive du travail intellectuel et immatériel devient dominante. Ce nouveau caractère central des connaissances et de l’intelligence collective pose la question de la rétribution de cette production de connaissance, qui est par nature collective et commune et qui fait l’objet d’appropriation exclusive par des acteurs économiques ».

Sans aucun doute, la réflexion menée autour du digital labor a le mérite d’ouvrir un champ d’investigation, infiniment plus large, sur la nécessaire redéfinition de la notion de travail et sur les conditions d’emploi qui, quel que soit le secteur d’activités, sont bouleversées par les technologies numériques. « Utiliser une plate-forme, est-ce un travail qui doit être reconnu comme tel ? », les théoriciens du digital labor cherchent à répondre à cette question. Mais il y en a d’autres, recensées par le Conseil national du numérique (CNNum) dans son rapport intitulé « Travail, Emploi, Numérique, les nouvelles trajectoires » :

  • Quelle place et quel statut pour le travail humain dans la société de demain ?
  • Le numérique favorise-t-il une automatisation émancipatrice des travailleurs ?
  • Le salariat est-il dépassé ?
  • Le numérique renforce-t-il la segmentation du marché du travail ?
  • Toute entreprise a-t-elle vocation à être « ubérisée » ? (voir La REM n°34-35, p.84).
  • Faut-il décorréler revenu et travail ?
  • Quel dialogue social à l’heure du numérique ?
  • Faut-il décorréler protection (droits) et travail (statuts d’emploi) ?

A toutes ces interrogations, il n’existe pour l’heure qu’une seule réponse évidente : « Agir est nécessaire », confirme le CNNum.

Sources :

  • Qu’est-ce que le Digital Labor, Dominique Cardon & Antonio A. Casilli, Etudes et controverses, Ina Editions, juin 2015.
  • Travail, Emploi, Numérique, les nouvelles trajectoires, rapport remis à la Ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, Conseil national du numérique, janvier 2016.

écrit par Françoise Laugée

Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 – IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

Source: Digital labor

[Séminaire #ecnEHESS] Yann Moulier-Boutang “Capitalisme cognitif et travail digital” (1 févr. 2016)

Pour la séance du lundi 1er février 2016 de mon séminaire EHESS Étudier les cultures du numérique : approches théoriques et empiriques nous avons eu le plaisir d’accueillir Yann Moulier-Boutang, professeur à l’Université de Technologie de Compiègne, co-fondateur de la revue Multitudes, et auteur entre autres des ouvrages L’abeille et l’économiste (Carnets Nord, 2010) et Capitalisme cognitif (Ed. Amsterdam, 2007).

Le séminaire a eu lieu à l’EHESS, salle 13, 105 bd. Raspail, 75006 Paris.

Retrouvez le livetweet du séminaire sur Twitter : hashtag #ecnEHESS.

Titre : Capitalisme cognitif et travail digital : un aller et retour.

Intervenant : Yann Moulier-Boutang.

Résumé : Qu’est-ce que l’approche théorique du capitalisme cognitif telle que Y. Moulier-Boutang la développe depuis 1999 peut apporter à l’analyse précise de toutes les formes de travail et d’activités subsumées dans la production de valeur actuelle ? Réciproquement qu’est-ce que l’analyse de terrain du travail digital (sur les moteurs de recherche, sur les plates-formes collaboratives des entreprises, dans l’économie sociale et solidaire numérisées, sur les réseaux sociaux, dans les Tiers lieux) peut-elle apporter à l’analyse de la composition sociale et technique du rapport capitaliste et donc des nouvelles classes sociales qui se désignent, des formes de cristallisation des résistances ou des subversion de l’ordre numériques ? Les humanités numériques ou digitales ne se bornent pas à des descriptions des fonctionnements nouveaux d’extraction de valeur; elles repèrent les contradictions nouvelles, les points de bifurcation qui acquièrent d’autant plus d’importance que la codification de l’activité aujourd’hui constitue l’un des enjeux majeurs des régimes de gouvernance qui cherchent à s’installer.


Compte- rendus des séances précédentes :

Prochaines séances :

  • 7 mars 2016Jérôme Denis (Télécom ParisTech) et Karën Fort (Université Paris-Sorbonne) “Petites mains et micro-travail”.
  • 4 avril 2016Camille Alloing (Université de Poitiers) et Julien Pierre (Université Stendhal Grenoble 3) “Questionner le digital labor par le prisme des émotions”.
  • 2 mai 2016Judith Rochfeld (Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et Valérie-Laure Benabou (UVSQ) “Le partage de la valeur à l’heure des plateformes”.
  • 6 juin 2016Bruno Vétel (Télécom ParisTech) et Mathieu Cocq (ENS) “Les univers de travail dans les jeux vidéos”.

Dans Le Monde : récension de “Qu’est-ce que le digital labor?” (10 déc. 2015)

Dans le quotidien Le Monde du 10 décembre 2015, David Larousserie nous livre un compte-rendu amusé et amusant de notre ouvrage Qu’est-ce que le digital labor? (INA éditions, 2015).

Eclairages

Quand Internet n’est plus « sympa »

LIVRE DU JOUR
David Larousserie

Qui a dit que les joutes intellectuelles avaient disparu ? En tout cas, pas deux des plus réputés sociologues français spécialistes des usages numériques, comme ils le montrent dans ce vivifiant essai consacré à une question émergente : le digital labor . Autrement dit, ce « travail » gratuit que les utilisateurs de plates- formes de réseaux sociaux, de ventes en ligne, de moteur de recherche effectuent en recommandant, « aimant », lançant des requêtes, interagissant, et que les entreprises monétisent auprès de publicitaires ou d’autres acteurs. L’expression a émergé à partir de 2009 aux Etats-Unis dans le champ académique pour de- venir un domaine de recherche actif. Production de valeur, mesures de performances, cadre contractuel (par les illisibles « conditions générales d’utilisation »), rappel à l’ordre pour pro- duire (par les notifications, alertes ou invitations diverses). Tout cela est bien du travail, décrit Antonio Casilli, sociologue à Télécom ParisTech, dans la première partie du livre. Et, dès lors, avec d’autres, il s’interroge sur les dispositifs d’exploitation, voire d’aliénation à l’œuvre ici comme dans n’importe quelle activité laborieuse. Le ton devient alors plus critique sur ces dérives marchandes qui accaparent la vie privée ou les biens communs.
Dominique Cardon, sociologue aux Orange Labs, dans une deuxième partie, commence par esquiver en prenant un recul original. La notion de digital labor relève plus de la posture que de l’analyse profonde. Elle se place à l’extérieur des sujets d’étude, donc au-dessus des internautes, pour leur dévoiler une aliénation qu’ils ignorent. Il raille donc ce point de vue, tout en détaillant les raisons intellectuelles et sociologiques qui ont amené à ce déferlement de critiques. « Internet était sympa, il ne l’est plus » , comme il le résume ironiquement. Bien sûr, les réseaux d’aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec ceux d’hier avec marchandisation, espionnage à grande échelle, domination de quelques géants. Mais, face à ce constat sombre, il préfère retenir la grande diversité des usages et la démocratisation de l’expression, qui sont toujours vivantes.
A distance, les mots doux s’envolent entre les deux spécialistes lors d’une troisième partie construite comme un dialogue : « aristocrate ! », « libéral ! », « paternaliste ! », « incohérent ! » . Cependant, les deux tombent d’accord sur un point. Dominique Cardon regrette la mainmise d’une vision « économiciste » dans les analyses (aliénation, exploitation, valeur, etc.). Antonio Casilli aussi en somme, en rejetant les solutions consistant à rétribuer les internautes échangeant sur les plates-formes, comme certains l’ont proposé. Il préférerait une « rémunération » qui « redonne aux communs ce qui a été pris aux communs », par exemple sous forme d’un revenu de base ou bien d’une taxation des entreprises liées aux données qu’elles exploitent. Au fil des échanges se dégage une vision particulièrement riche des mutations à l’œuvre à propos d’Internet et de ses utilisateurs.

Qu’est-ce que le digital labor ?
de Dominique Cardon et Antonio Casilli
INA Editions, 104 p., 6 euros