DSK et la morale institutionnelle du FMI

Qu’est-ce que Dominique Strauss-Kahn et Julian Assange ont un commun (à part leurs cheveux blancs et une certaine allure d’outsiders) ? Tous les deux ont été accusés du même crime odieux.

On a déjà débattu et décortiqué l’affaire Assange. Et nul doute que l’on va faire de même pour DSK. Et bien sûr, au delà de la authenticité des accusations, on ne se lassera pas d’insister ici sur la portée politique de ces scandales sexuels. La question que nous pouvons d’ores et déjà nous poser n’est pas – comme le feraient les théoriciens du complot – à qui profitent ces arrestations (<sarcasme> au tandem politique Obama/Clinton dans le cas d’Assange ? au tandem politique Sarkozy/Le Pen dans le cas de DSK ? </sarcasme>).

Il y a une question qui est à mon avis encore plus essentielle et qui était bien posée dans cet article de Joshua Gamson, paru dans le revue Social Problems : quelle est la portée normative d’un scandale sexuel pour les institutions impliquées ?

En gros : chaque affaire ayant trait à une accusation d’ordre sexuel aménage une narration médiatique qui vise à réaffirme un ordre normatif. Ainsi, certaines affaires deviennent des histoires exemplaires de l’importance de la loyauté, ou de la constance, ou de la rectitude. Ces valeurs ont une portée non pas au niveau de l’individu qui est au centre de l’affaire, mais pour l’institution qui l’encadre. C’est une manière pour l’institution même de se rappeler, en stigmatisant l’un de ses membres, qu’un noyau de valeurs morales existe après tout et doit être respecté.

Dans le cas de Strauss Khan, son appartenance institutionnelle, de facto reste celle du Fonds Monétaire International. Une institution qui lutte depuis la fin des années 1990 pour se débarrasser de son image de gardien brutal de l’ordre monétaire établi – après des interventions de redressement des finances publiques de pays émergents particulièrement agressives.

L’agression sexuelle dont DSK est accusé n’est qu’un miroir cette image exécrable de son institution – une image que la stigmatisation médiatique isole et (en la collant à un seul individu) exorcise ou niveau collectif.